mercredi 12 novembre 2008

Humeur : Le poulet, le taureau et le vison.

Plusieurs petites discussions récentes m'ont fait sentir à quel point les valeurs et les combats sont volatils.

Aujourd'hui, lorsque l'on veut aborder le problème de la corrida ou celui du marché de la fourrure, il est commun de se voir objecter l'argument fondamental "Tu manges bien du poulet". En d'autres termes "C'est bien joli de combattre le torero ou le fourreur mais commence par devenir végétarien !".

Certes, je ne peux qu'admettre une part de responsabilité évidente dans l'équarrissage planétaire mais tentons de remettre un peu de hiérarchie dans les termes et les arguments. Tuer du poulet, du bœuf ou du poisson pour nourrir l'être humain ne peut être placé sur le même plan que saigner un taureau pour son morbide plaisir ou dépecer un vison pour jouer sa pétasse de luxe. Préciser que le vison est un animal d'élevage, ce qui semble être, pour certains, un moindre mal, renvoie directement au taureau, bestiole nettement plus imposante mais d'élevage également. Le vison mérite-t-il d'avantage le droit à la mort que le taureau ? Dans le cadre des stricts plaisirs frivoles, qu'ils soient vestimentaires ou tauromachiques, non !

Oui, mais la tradition ? Ah, la tradition, leitmotiv récurant du lobby des chasseurs, entre autre, parmi lesquels on retrouve en bonne proportion d'ailleurs, les amateurs de corrida et de fourrure. La tradition pourrait ainsi justifier par exemple que l'on tue des centaines de dauphins chaque année dans les îles Féroé juste pour le "fun", que l'on réduise en poudre les cornes de rhinocéros pour en faire des fortifiants sexuels, que l'on repeigne la banquise en rouge en saignant les bébés phoques, que l'on massacre les palombes dans le ciel des landes en période de nidification, que l'on débusque le renard porteur de rage pour en confectionner des étoles, que l'on excise les petites filles pour interdire le plaisir... (ah non pas ça, c'est pas du jeu… là, ce sont des traditions de sauvages), que l'on enferme des femmes dans des bourquas... (non pas ça, on a dit, c'est pas des bonnes traditions de chez nous !). Bon d'accord, il y aurait donc des bonnes et des mauvaises traditions... bigre, voilà qui change la donne !

Elle a bon dos la tradition. Il n'y a pas si longtemps que cela, chasser sur les terres du seigneur (toutes les terres appartenaient aux seigneurs) était passible au mieux de la bastonnade, au pire de la pendaison. Fort heureusement, une révolution fit le tour du problème pour renverser l'ancienne tradition. Les traditions seraient donc faites pour ne pas durer... C'est pourtant fort pratique la tradition, en quelque sorte un dépotoir de méchantes pratiques et de mauvaises pensées, un repère pour les pervers et les peureux du lendemain...

Je ne suis pas un Taliban de la cause animale. Au risque de heurter la sphère végétarienne, le cerveau de l'homme n'a pu réellement se développer qu'en absorbant des protéines musculaires. Le règne animal est divisé, principalement, en herbivores, carnivores et omnivores. Les végétariens ne sont apparus que vers la fin du XXe siècle. Il y a donc une légitimité à se taper un bon steak bleu de temps à autre et le poulet fait parti de mes menus sans que cela ne me pose un problème éthique insurmontable.

Par contre, élever des animaux et les tuer pour le plaisir des yeux me révulse profondément.

11 commentaires:

Suicufnoc (jr) a dit…

Pour ma part je n'aime pas la corrida mais j'aime le torro bravo en ragout.

J'ai un ami qui lui déteste manger les poulets mais adore leur courir après avec une machette.

Je n'ai jamais mangé d'humain mais je me demande si les végétaliens ont le même gout que les gens normaux.

Suis-je normal ?

Suicufnoc (jr)

patbac a dit…

Cher Suicufnoc (jr)

Je retrouve bien là votre appétence pour l'épicurisme et ses multiples plaisirs buccaux. Vous me communiquerez d'ailleurs à l'occasion votre recette du fameux ragoût de Torro Bravo, éternel classique madrilène que j'avais déjà eu l'occasion de goûter à la table du non moins fameux Señor Luchador.

Ensuite, vous devez sûrement faire allusion aux typiques chasses au poulet sauvage du Honduras. J'avoue ne pas souscrire à ce genre d'activité bien que pouvant admettre le frisson ressenti lorsque l'arme tranche et comprendre ensuite la grosse partie de rigolade lorsque le volatile décapité s'enfuit en zigzaguant dans les sous-bois où il finira tranquillement ses jours.

Enfin, bon nombre de mes patients prétendent que les végétaliens sont plus tendres sous la dent, bien que moins goûteux, que leurs autres congénères... il fallait s'en doutait.

En somme, chez Suicufnoc, je ne vois dans votre courrier que les réflexions naturelles d'une personnalité normale, oserai-je dire banale ?

Portez-vous bien.

Pr Patbac.

Suicufnoc (jr) a dit…

Merci, me voilà rassuré.

Il ne me reste plus qu'à faire descendre dans l'arène deux ou trois végétaliens et à faire donner les picadors

Z/.

Suicufnoc (jr) a dit…

Au fait, le secret avec le torro bravo, c'est la cuisson lente à feux très doux sans jamais porter à ébulition.

Mais ne l'ébruitons pas.

ZL a dit…

Information de dernière minute : j'ai déjeuné tout à l'heure avec une jeune femme végétarienne. Vous me croirez si vous le voulez, mais elle était à croquer. T/.

Meredith Benzazon a dit…

Vous êtes une joyeuse bande de dingues ;-) !

clodlemaire a dit…

La corrida fait rire certains...et ne dit-on pas que cela vaut un bon beefsteak...
Personnellement je me moque de ce que l'on fait des animaux d'élevage, je me préoccupe plus du devenir des humains d'élevage, qui finalement vont aussi à l'abattoir sans que cela choque le moins du monde la majorité des bien-pensants...
Et la seule chose que j'ai jamais trouvé de bien chez Brigitte Bardot c'est son tour de poitrine...qui, agrémenté du petit pois qu'elle a dans la tête, pourrait être un met tout à fait défendable...quoique vu son age (elle est né en 1933) il faudrait faire faisander un peu la viande...mais la faim justifie les moyens...

Meredith Benzazon a dit…

Une vie sacrifiée
Sur l’autel du spectacle
Spectateurs intentionnés
Assassinat, débâcle

Mise à mort orchestrée
Devant des yeux conquis
Mise en scène chorégraphiée
Pour fêter la fin d’une vie

(MB en 2003)
Bah oui, j'en profite pour caser ma prose ;-)

clodlemaire a dit…

Elle écrit bien mon amoureuse....je suis toujours bluffé par sa plume...celle qu'elle a au bout des doigts.

reyvilo a dit…

Mesdames, Messieurs, souhaitez-moi la bienvenue...(silence pour vous laisser le temps)...
Permettez-moi de m'immiscer dans cet échange capello-culino-traditionnaliste.Pour ma part, il y a une tradition culinaire qui a ma préférence, parce que délicate et raffinée comme seuls sont capables certains de nos camarades asiatiques, c'est celle qui consiste à trépaner un singe dont on a fixé la tête pour en déguster à la cuiller le cerveau encore palpitant. L’animal est évidemment rétif, on le serait à moins; il manifeste donc son mécontentement par des couinements: mais, c’est une garantie de fraicheur; tant que l'animal couine, on est sûr de ne pas finir la nuit à l'hôpital. Ce n'est pas comme les huitres; Avez-vous jamais entendu le cri d'une huitre? il faut avoir une bonne ouïe pour entendre leurs douces mélopées siréniennes. Elles ne mettent aucune volonté pour nous prévenir:"'tention! shuis pô fraiche!" Le singe, lui, collabore, il participe pleinement à nos agapes ; c’est indéniablement un agréable animal de compagnie ; de plus les circonstances font qu’on n’a pas le temps de s’y attacher…
Alors pour le réveillon de ce soir, innovez, que diable! Pensez au singe!..N'oubliez pas la scie et les petites cuillers-ou les grosses pour les gourmands-mais les petites c’est mieux, croyez-moi : autant profiter de la certitude que nous avons un produit frais pour le déguster avec parcimonie et délicatesse jusqu’à la fin de la nuit.
... si vous persistez à manger des huitres, en ce cas, munissez-vous d’un sonotone…
…Bon, il me reste un are de moquette : j’y retourne.
reyvilo

clodlemaire a dit…

Pour rebondir sur les traditions culinaires, nous avons la carpe cuite vivante et servie encore toute frétillante...le jeu consistant à découper en fines lamelles les filets du carpidé puis, en le tenant par les ouïes et la queue, plonger l'animal dans un bain d'huile bouillante...attention à ne pas le tuer, sinon il faut tout recommencer et nos stocks ne sont pas inépuisables...mais tous cela n'est rien à coté du met le plus délicat : le fromage de Langre qui n'est bon qu'avec ses vers remuant...si si j'ai essayé et ben c'est vraiment bon...Enfin, nos amis sportifs des Andes ne nous contrediront pas : les meilleurs mets sont toujours les plus inattendus...mais au fait, quid du cri de la banane lorsqu'elle est découpé en rondelles (fines) pour une salade de fruits...ah, la bouffe...la bouffe...c'est quand même ce qu'il y a de meilleur avec le sexe, le jeu, l'alcool, les psychotropes et le fric...etc etc...